


Accessibilité numérique : Pourquoi il est urgent de se former ?

Organisé par FrontGuys, ce 18ᵉ Meetup a réuni professionnels du produit, du design et du développement autour d’un thème à la fois fondamental et encore trop souvent marginalisé : l’accessibilité numérique. Pendant plus d’une heure, Hamza Iqbal (Lead Dev Front et expert accessibilité chez FrontGuys) et Perrine Croix (Lead Product Designer et fondatrice de Design for Change) ont livré des retours d’expérience francs, lucides et opérationnels. J’ai pu animer cet échange qui a mis en lumière les paradoxes, les mythes et les leviers concrets liés à l’accessibilité numérique aujourd’hui.
L’un des premiers constats partagés par les intervenants est cette résistance récurrente de la part de certains clients qui, face au mot « accessibilité », rétorquent instinctivement que leur public n’est pas concerné. C’est un réflexe de protection, presque une défense identitaire, qui fait écran à la réalité : l’accessibilité concerne d’abord celles et ceux pour qui les usages numériques sont les plus contraints.
Perrine a insisté sur le fait qu’en diluant le sujet dans des phrases toutes faites du type « l’accessibilité, c’est pour tout le monde », on perd souvent de vue la priorité : permettre aux personnes en situation de handicap d’accéder aux contenus et aux services dans de bonnes conditions. Ce n’est pas un effet secondaire : c’est le cœur de la démarche. La visée universelle vient ensuite, mais elle ne doit jamais masquer cette première responsabilité.
Une autre confusion fréquente dans les organisations réside dans l’utilisation des termes « expert » et « référent ». Dans les faits, ces rôles sont bien distincts. L’expert accessibilité possède généralement un bagage technique conséquent, une maîtrise fine des référentiels, des outils de tests, des critères d’évaluation et peut s’insérer dans les cycles de production. Le référent, lui, s’occupe de l’organisation de l’accessibilité numérique en interne et gère le budget dédié aux moyens humains et matériels. Il a la vision globale sur la stratégie, sur les services à mettre en conformité, sur le plan d’action, sur les besoins de formations. Il n’est pas nécessaire que le référent soit un expert du terrain mais il doit être capable de porter le sujet, de le défendre et de faciliter sa diffusion.
Hamza souligne que dans certaines structures, on nomme “référent accessibilité” une personne qui n’a reçu aucune formation et n’a pas de temps alloué à cette fonction. Cette position crée souvent des blocages. Il est crucial que le rôle soit défini, légitimé, et qu’il bénéficie d’une véritable reconnaissance dans l’organigramme produit/tech.
La question du 100 % conforme est revenue naturellement dans les échanges. Juridiquement, la loi impose une exigence de conformité, en particulier via le référentiel RGAA. Mais dans les faits, atteindre une conformité parfaite est quasi impossible, surtout sur des systèmes complexes ou évolutifs.
Hamza insiste : il ne faut pas confondre conformité et accessibilité réelle. Un site peut avoir un taux de conformité très élevé suite à un auditUn Audit est une évaluation systématique d'un processus ou d'une entité pour vérifier sa conformité, son efficacité ou sa qualité. More RGAA et rester inutilisable pour un utilisateur avec des besoins spécifiques. Pourquoi ? Parce que l’usage ne se résume pas à des critères. Il s’agit d’un vécu, d’une interaction, d’un parcours. L’auditUn Audit est une évaluation systématique d'un processus ou d'une entité pour vérifier sa conformité, son efficacité ou sa qualité. More est une photographie ; l’expérience est un film.
Perrine abonde dans ce sens en expliquant que la vraie accessibilité se mesure à la capacité d’un utilisateur à accomplir ses tâches en autonomie, pas au nombre de critères validés.
Quand une entreprise découvre ses obligations ou souhaite initier une démarche, la tentation est forte de commencer par un auditUn Audit est une évaluation systématique d'un processus ou d'une entité pour vérifier sa conformité, son efficacité ou sa qualité. More. Mais les intervenants mettent en garde contre cette approche trop rigide. L’auditUn Audit est une évaluation systématique d'un processus ou d'une entité pour vérifier sa conformité, son efficacité ou sa qualité. More est parfois trop technique et trop éloigné de la réalité métier pour embarquer les équipes.
Il peut être préférable de démarrer par une phase d’écoute, des interviews, une cartographie des parcours ou un micro-diagnostic des irritants majeurs. L’idée est de créer de la clarté et de l’adhésion avant de plonger dans le RGAA.
Derrière cela, se pose la question de l’acculturation. Qui sont les personnes à convaincre ? À quel moment ? Quel est le niveau de maturité du produit, de l’organisation, de la culture d’équipe ? Toutes ces questions structurent une stratégie progressive et réaliste. Et surtout : une stratégie adaptée à chaque entreprise, pas un modèle plaqué.
La formation est perçue comme incontournable, mais elle est souvent mal ciblée. Les sessions générales sur l’accessibilité finissent parfois par noyer les participants dans une masse d’informations abstraites. Hamza défend une approche granulaire : former chaque type de profil sur ce qui le concerne directement.
Par exemple, un PO doit comprendre comment intégrer l’accessibilité dans une US. Un développeur doit connaître les bonnes pratiques HTML. Un designer doit savoir anticiper les contrastes et la navigationEnsemble de liens et de boutons qui aident les utilisateurs à se déplacer et à trouver des informations dans une interface. More au clavier. Et un rédacteur doit apprendre à écrire pour les lecteurs d’écran et pour les personnes ayant des troubles cognitifs.
La question du format importe aussi. Les formats courts, thématiques, réguliers, semblent plus efficaces que les formations denses en une ou deux journées. Mais au fond, la seule bonne formation est celle qui débouche sur une pratique.
Un point très intéressant du meetup a été d’aborder l’accessibilité comme catalyseur de collaboration. Car oui, intégrer l’accessibilité pousse à mieux structurer les processus, à mieux rédiger les US, à mieux communiquer entre design et développement.
Cela oblige à poser des critères clairs, à anticiper les tests, à documenter ce qui ne l’était pas. Bref, cela professionnalise l’ensemble de la chaîne produit.
Hamza insiste sur un point souvent négligé : les personnes peuvent devenir autonomes dans la vérification de l’accessibilité, à condition d’avoir les bons outils et les bons repères. Cela désacralise le sujet, le rend praticable.
Tester avec des utilisateurs en situation de handicap reste rare. Et pourtant, c’est là que tout se joue. Les audits donnent des pistes. Les tests montrent les conséquences. Ils incarnent la réalité des usages.
Les intervenants rappellent que ces tests ne sont pas forcément complexes à organiser. Ils peuvent être ponctuels, sur un parcours précis, et permettre de recueillir des retours concrets. Ils permettent aussi de créer un choc culturel salutaire en interne : voir une personne bloquée sur un formulaire que l’on pensait “OK” est plus parlant qu’un tableau Excel.
Perrine ajoute qu’il est parfois compliqué d’aller chercher des personnes en situations de handicap dans les panels de testeurs ; il faut alors se tourner vers des associations. Elle insiste sur le fait qu’il faut penser à rémunérer les personnes qui donnent de leurs temps pour les tests.
Le coût est un sujet qui revient souvent en entreprise. Et pour cause : l’accessibilité est perçue comme un supplément, un projet à part. Pourtant, elle coûte surtout cher quand elle est traitée trop tard. Lorsqu’on doit revoir toute une architecture, refaire des composants, ou corriger des centaines de contenus publiés.
Au contraire, quand elle est intégrée dès le départ, le coût de l’accessibilité est lissé et amortit dans le temps. C’est une question de choix de design, de rédaction, de structuration. Et ce sont ces choix-là qui coûtent le moins.
Quant au fameux ROI, les intervenants sont prudents. Peut-on vraiment parler de retour sur investissement quand il s’agit d’équité, d’inclusion, de droit d’accès à l’information ? Le vrai coût, disent-ils, c’est le coût du renoncement : tous les utilisateurs que l’on exclut sans le savoir.
Le marché voit émerger des solutions qui promettent des audits en quelques secondes, des widgets qui “rendent un site accessible” en un clic. Ces promesses sont dangereuses.
L’IA peut effectivement aider : génération de textes alternatifs ou de sous-titres, détection de contrastes, analyse de code HTML. Mais aucun outil ne peut remplacer l’intention humaine, la compréhension du contexte, la finesse de l’expérience.
Comme le dit Hamza avec humour : “Un auditUn Audit est une évaluation systématique d'un processus ou d'une entité pour vérifier sa conformité, son efficacité ou sa qualité. More parfait en 15 secondes, ça existe… mais pour ceux qui veulent y croire.” Ce qu’il faut viser, c’est une IA comme assistante, jamais comme solution magique.
Ce meetup a montré que l’accessibilité n’est pas une exigence technique ou juridique, mais un levier profond de qualité, de transformation et d’éthique dans les organisations. Ce n’est pas une case à cocher, ni un bonus. C’est une exigence de justice.
C’est aussi un vecteur de progression : pour les produits, pour les équipes, pour la société dans son ensemble.