


Accessibilité web : Comment choisir la bonne alternative textuelle ?

Frontguys était présent à A11Y Paris le 25 juin 2024, l’évènement incontournable de l’accessibilité numérique en France !
Ce rendez-vous annuel réuni les professionnel.le.s, les utilisateur.ice.s ainsi que les représentant.e.s des autorités de contrôle autour de conférences, de retours d’expérience et d’état des lieux autour de l’accessibilité numérique.
Pour cette 5ème édition, l’évènement se déroulait à la Maison de la radio et de la Musique avec pas moins de 600 personnes inscrites. A11YA11Y est un numéronyme pour "accessibility" (accessibilité en français). Il décrit la conception de produits pour être accessibles à tous, y compris les personnes handicapées. More Paris était organisé par l’association Valentin Haüy et Tanaguru.
Nous avons ainsi pu voir des présentations sur des outils d’assistance, des travaux de mise en conformité, des études et des plans d’actions liés à l’accessibilité numérique en France.
Les intervenant.e.s et l’audience ont également pu discuter et échanger autour des problématiques quotidiennes de mise en conformité et surtout mettre en exergue les freins encore trop importants liés aux choix politiques et réglementaires.
Dans cet article, découvrez nos retours et nos ressentis sur l’évènement A11YA11Y est un numéronyme pour "accessibility" (accessibilité en français). Il décrit la conception de produits pour être accessibles à tous, y compris les personnes handicapées. More Paris :
A11YA11Y est un numéronyme pour "accessibility" (accessibilité en français). Il décrit la conception de produits pour être accessibles à tous, y compris les personnes handicapées. More Paris a permis de mettre en avant les travaux et réalisations de plusieurs professionnel.le.s de l’accessibilité numérique.
Nous avons eu le droit à une table ronde pour parler de la prise en compte de l’accessibilité dans la création d’un Design System. Nous avons ainsi pu écouter Stéphanie Walter (Maltem consulting), Axel Nini (Société Générale) et Maxime Beaugrand (Service d’Information du Gouvernement) parler de leur quotidien de Designer et de la nécessité d’intégrer les critères d’accessibilité au plus tôt.
Le Design System est un outil efficace et vertueux pour répercuter à grande échelle des itérations sur l’accessibilité. Il est nécessaire de construire une communauté autour du DS pour tester les composants en conditions réelles car il est possible de faire des interfaces non-accessibles avec des composants qui le sont techniquement au niveau de l’atome.
Du côté du Design System du l’Etat, Maxime Beaugrand nous a expliqué que la question de l’accessibilité ne se posait pas, tout le monde est sensibilisé et formé pour créer des interfaces conformes au RGAA. De leur côté, Stéphanie Walter et Axel Nini nous ont rappelé que ce n’est pas aussi naturel du côté des entreprises privées bien qu’étant légalement obligées de se conformer. L’accessibilité est souvent négligée ou prise en compte trop tard dans les projets. Les interactions utilisateurs et les besoins en accessibilité sont rarement bien documentés et communiqués aux équipes de développement.
Les 3 spécialistes étaient unanimes sur la nécessité de former les équipes de design et de développement à l’accessibilité, d’adopter les bonnes pratiques et réflexes dès les premières étapes de conception et de développement, et surtout d’impliquer activement les personnes en situation de handicap pour garantir des solutions véritablement accessibles. Les tests utilisateurs sont une aide précieuse pour éviter des coûts de correction plus élevés ultérieurement.
Note importante : Bien que les employés internes en situation de handicap puissent servir de testeurs, il est crucial de ne pas les considérer automatiquement comme des « rats de laboratoire ». Aucune personne ne devrait avoir à se justifier à cause de son handicap, même pour des raisons dites « positives ».
Dans le domaine de l’accessibilité numérique, il ne s’agit pas de proposer des interfaces « moyennes » qui répondraient simultanément à une multiplicité de handicaps. Comme le rappelle Denis Chêne, Responsable de projet Accessibilité Recherche chez Orange, « l’égalité n’est pas l’uniformité ». C’est dans cette optique qu’Orange a développé le projet Orange Confort +.
Cette solution open source vise à améliorer le confort de tou.te.s et à promouvoir les sites web accessibles. Basé sur le concept de « Design for All », cet outil valorise la multimodalité, permettant d’adapter le contenu de diverses manières afin de le rendre accessible à chacun.e grâce à de nombreux réglages. Cela inclut des « paquets de modes d’usages » offrant plusieurs façons d’interagir avec les interfaces selon les besoins.
Orange Confort + propose donc une vingtaine d’options pour adapter les sites Web suivant une situation temporaire ou permanente (déficiences visuelles ou simple fatigue, problèmes de reconnaissance des mots pour des raisons de dyslexie ou autres, difficulté à utiliser une souris …). La promesse est simple : un paramétrage à réaliser une fois pour tous les sites Web.
Il est toutefois important de rappeler que ce type d’outil, bien que permettant d’améliorer l’accessibilité et l’utilisation des sites web, n’exempt pas le respect des règles d’accessibilité.
Le Pays Basque était particulièrement à l’honneur durant cette journée grâce à Daniel Olçomendy (Élu de la Communauté d’Agglomération Pays Basque, chargé au Tourisme durable et à l’Accessibilité universelle du territoire). Ce dernier nous a présenté les travaux de mise en conformité des sites de la Communauté d’Agglomération Pays Basque mais nous a surtout expliqué sa démarche.
Dans sa volonté de se mettre en conformité avec le RGAA, la Communauté d’Agglomération Pays Basque a bien évidemment placé l’accessibilité numérique au coeur des appels d’offres. Malheureusement, les équipes de Daniel Olçomendy ont fait face à des problèmes de taille : des « professionnels » ne connaissant ni l’accessibilité numérique, ni ne comprenant son utilité ! Toutefois, les efforts et la recherche de partenaires partageant la même vision fut fructueuse car aujourd’hui le Pays Basque dispose aujourd’hui d’une plateforme appelé Elgarweb.
Elgarweb est une plateforme basée sur le CMS français Translucide qui permet d’obtenir des sites écoconçus et accessibles. Cette plateforme est pensée comme une boîte à outils qui permet aux communes du Pays Basque, quelle que soit leur taille, de disposer d’un site Internet accessible, performant et personnalisé tout en profitant d’un socle technique mutualisé.
Cerise sur le gâteau : Elgarweb permet de créer des sites conformes à 100% au RGAA.
À ce jour, 10 sites 100% conformes sont en ligne et 4 sont en cours de développement. Ces initiatives visent à créer un environnement numérique inclusif, garantissant que les services numériques soient utilisables par tous, indépendamment des capacités physiques ou cognitives des utilisateurs.
La Fédération des Aveugles et Amblyopes de France était représentée par Katie Durand et Denis Boulay. Cet organisme regroupe des militant.e.s, des usagers, des professionnel.le.s et bénévoles engagé.e.s ensemble pour une plus grande inclusion sociale et économique des personnes déficientes visuelles.
Durant leur intervention, Katie et Denis nous ont présenté les résultats de l’Observatoire du respect des obligations d’accessibilité numérique basés sur près de 4000 sites contrôlés. Le but de cette étude est de vérifier si les sites devant se conformer au RGAA respectent leurs obligations d’affichage (mention en page d’accueil, déclaration d’accessibilité, publication de schéma pluriannuel) et de mettre en avant leur taux de conformité.
Le moins que l’on puisse dire est que les chiffres sont aussi mauvais qu’inquiétants. Sur les 3993 sites contrôlés :
Il pourrait être tentant de se dire que ces chiffres sont aussi bas car cette étude mélange des sites de services publics avec des sites d’entreprises privées. Le problème est que les résultats sont toujours aussi médiocres quand on s’intéresse au secteur public uniquement :
Dans son introduction à cette journée, Isabelle Saurat (Déléguée interministérielle à l’accessibilité) a déclaré que d’ici trois ans, 100% des sites de l’État seront conformes.
Pour être complet, il est important de signaler que l’Observatoire s’appuie exclusivement sur les éléments déclarés par les sites internet et qu’il ne vérifie pas les intranets, les applications mobiles et les communications qui sont également soumis aux obligations légales de conformité. De plus, il ne s’assure pas de la véracité et de la pertinence des contenus déclarés et n’atteste donc pas du caractère réellement accessible des sites contrôlés.
Alain Vagner et Dominique Nauroy du SIP (Service Information et Presse) du Luxembourg nous ont fait part des référentiels en vigueur chez eux. Depuis plusieurs années, le Luxembourg utilise le RGAA pour auditer ses services web tout en s’alignant avec la norme européenne d’accessibilité EN 301 549.
Concrètement, le SIP comble l’écart entre la France et l’Europe en complétant les 106 critères du RGAA avec 30 critères supplémentaires dont voici quelques exemples :
Ces nouveaux critères s’intègrent naturellement dans le RGAA (même glossaire, mêmes méthodes de tests) et sont répartis dans les 13 thématiques originelles ou dans les 4 nouvelles (Documentation et fonctionnalités d’accessibilité, Outils d’édition, Services d’assistance et Communication en temps réel).
Le Luxembourg possède donc les 3 référentiels d’accessibilité suivants :
En quelques minutes les Luxembourgeois nous ont montré qu’ils avaient dépassé la France en matière d’accessibilité numérique avec moins de moyens mais avec une démarche intelligente, itérative et Open Source. En bonus, nous avons également appris quelques mots en luxembourgeois, comme « Moien », qui signifie « Bonjour ».
Depuis peu l’Arcom (Autorité de Régulation de la Communication Audiovisuelle et Numérique) s’est vue confiée la mission de veiller au respect d’un certain nombre d’obligations relatives à l’accessibilité des services numériques. Laurence Pecaut-Rivolier (membre du collège de l’ARCOM) a présenté un plan d’action pour appliquer cette nouvelle responsabilité qui consiste à :
Laurence Pecaut-Rivolier a indiqué que l’ARCOM a envoyé 133 courriers depuis mars 2023 à diverses administrations publiques pour leur rappeler leurs obligations. Elle a également rappelé que le but de l’ARCOM n’est pas de sanctionner à tout va mais bien de sensibiliser, guider et accompagner les responsables des sites à adopter une démarche de mise en conformité.
Bien que la démarche soit louable et aille dans le bon sens, l’ARCOM a provoqué le grand étonnement du public en avouant que seules 2,5 personnes étaient allouées aux tâches de contrôle qui concernent … 200 000 sites !
Le climat s’est davantage tendu quand la représente de l’ARCOM a expliqué que l’organisme attendait impatiemment (dans les 6 mois) la création d’un outil d’Intelligence Artificielle pour lui faciliter son travail de contrôle. Les spécialistes de l’accessibilité n’ont pas hésité à exprimer leur inquiétude et leur frustration quant à cette révélation en insistant sur le fait qu’aucun outil de ce genre pourra remplacer la vérification humaine. La problématique resterait la même : pas de résultat sans moyen humain !
La journée s’est terminée avec une table ronde pour discuter du présent et de l’avenir du RGAA. Nous avons donc retrouvé Armony Altinier (Koena), Antoine Cao (DINUM), Sébastien Delorme (Ideance), Aurélien Levy (Temesis) et Audrey Maniez (Access42) pour faire un état des lieux du référentiel français et répondre aux inquiétudes grandissantes des spécialistes.
Antoine Cao a indiqué que la DINUM (Direction InterMinistérielle du Numérique), bien qu’ayant un budget alloué au RGAA, ne disposait pas des ressources humaines nécessaires pour faire évoluer le référentiel afin de le rendre conforme à la directive européenne. Le RGAA n’est donc pas maintenu depuis plus d’un an (version 4.1.2 publiée en avril 2023) et n’est pas aligné avec la norme européenne d’accessibilité EN 301 549. Pire, il est possible qu’aucune action ne soit entreprise avant peut-être… 2027 !
Il est aujourd’hui impossible d’avoir une vision claire sur l’avenir du RGAA et de ses prochaines évolutions. Il existe pourtant de nombreuses demandes de corrections et de clarifications mais qui restent sans réponse de la part de la DINUM. La gestion de l’accessibilité numérique en France est grandement remise en question lors de cette table ronde.
Beaucoup d’expert.e.s en accessibilité préfèrent se tourner vers les référentiels luxembourgois pour auditer et mettre en conformité les sites. Même si la loi française ne peut pas faire mention à des référentiels étrangers, il s’agit certainement de la meilleure chose à faire à l’heure actuelle…
Comme on s’y attendait, ce fut une journée riche en enseignements où nous avons oscillé entre émerveillement, anxiété, surprise et questionnement. La France a la chance de posséder depuis toujours de très grand.e.s expert.e.s en accessibilité numérique mais malheureusement beaucoup de freins viennent les empêcher de mener à bien leur mission d’utilité publique. Voici un résumé de ce que nous avons retenu :
Concernant l’événement en soit, A11YA11Y est un numéronyme pour "accessibility" (accessibilité en français). Il décrit la conception de produits pour être accessibles à tous, y compris les personnes handicapées. More Paris a encore une fois tenu ses promesses : une organisation au top, des intervenant.e.s de qualité, des présentations claires et captivantes le tout dans un lieu superbe (Maison de la radio et de la Musique). Un évènement aussi qualitatif et surtout gratuit pour le public, mérite encore plus de visibilité et de soutien. Merci Frederic Halna et Manuel PEREIRA pour l’organisation et l’animation de cette journée.